Cette semaine, je vous emmène découvrir une initiative originale et inspirante : la création d’un jardin pédagogique par un groupe d’assistantes maternelles à Issy-les-Moulineaux (92). On parle souvent de jardins dans les crèches et les écoles mais je n’avais encore jamais entendu parler d’une telle idée menée par un groupe indépendant de professionnelles de la petite enfance. Quelle belle initiative que de vouloir offrir au coeur d’une ville des activités pédagogiques pour les tout-petits autour de la nature. J’ai découvert cette association par hasard sur les réseaux sociaux et évidemment, j’ai eu envie d’en savoir plus ! J’ai donc contacté Myriam Heim à l’initiative du projet et fait (encore une fois), une très belle rencontre.
Myriam m’a donné rendez-vous dans le jardin par une belle matinée de février. Elle m’avait prévenue : « J’ai demandé à tout le monde de venir pour la photo ! » Et elles sont toutes là : Halima, Rosa, Arlette, Marie, Maria, Constance, Fatima, Carole, Valérie…. accompagnées de leurs bouts de choux. Elles sont venues pour faire une grande et belle photo de famille et me parler de ce projet de jardin partagé, concrétisé en avril 2019, grâce à la volonté et l’énergie de Myriam.
Je voulais que les enfants puissent avoir un lieu au coeur de la ville pour se connecter à la nature
Le regard direct, le sourire communicatif, Myriam me parle avec passion de ce projet de jardin pédagogique qui l’occupe depuis 3 ans. L’idée à germer simplement en se promenant dans la ville. « Au gré des balades dans Issy-les-Moulineaux avec les enfants, j’ai constaté qu’il y avait de nombreux espaces verts. Je me renseignais régulièrement auprès des jardiniers pour savoir à qui appartenait les parcelles. Je me disais que cela serait tellement bien d’avoir un lieu au coeur de la ville où les enfants en garde chez nous puissent se connecter à la nature. C’est important que dès leur plus jeune âge, les petits comprennent que les tomates cerises ne poussent pas dans les barquettes du supermarché ! »
« Dans mon village, il y avait de 250 habitants et 3 millions de vaches !
Il faut dire aussi que Myriam a vécu toute son enfance en pleine nature. « Dans mon village de Franche Comté, il y avait 250 habitants et 3 millions de vaches ! m’explique-t-elle en riant ! Mes sœurs et moi, faisions du jardinage avec nos parents. Nous allions aussi chercher le lait tous les matins à la ferme. L’hiver, on avait les cils qui gelaient. Et l’été, nous aidions aux foins.
30 ans de vie professionnelle dans la restauration
Très jeune, j’ai quitté cette vie à la campagne pour aller étudier l’hôtellerie-restauration. Au fil des années, j’ai aussi ajouté la sommellerie à mes compétences. J’ai eu la chance de travailler dans de belles maisons avec de grands chefs très créatifs. J’ai ainsi eu le grand plaisir de travailler avec François Pasteau à l’Epi Dupin. Il est l’un des premiers à avoir réorganisé son restaurant autour d’une vision éco-responsable de la cuisine : tri sélectif, vins bios, démarche responsable autour de la pêche, du choix de légumes. Puis je suis devenue la sommelière et directrice d’une table d’hôte gastronomique dans le 15ème : L’os à moelle tenu par le chef Thierry Faucher. Mon enfance au milieu des champs et toutes ces années dans le monde de la gastronomie m’ont rendue férue de nature et de goût. Car l’un ne va pas sans l’autre. C’est pourquoi, j’avais vraiment à coeur de transmettre aux enfants ce qui me semble bon pour eux. »
Un monde m’attirait depuis longtemps : la petite enfance
Il y a 6 ans, Myriam décide de quitter cette vie à 100 à l’heure pour un métier plus tranquille. « J’avais besoin de me retrouver dans quelque chose qui m’attirait beaucoup depuis plusieurs années : la petite enfance. Lorsque je rentrais chez moi, je voyais les assistantes maternelles dans les parcs. Tout semblait si doux, si lent … Le contraire de la restauration ! Ma fille avait alors 10 ans et je sentais qu’elle avait besoin de moi. Il était temps de changer de métier. Finalement, j’ai opté pour une formation d’assistante maternelle agréé par l’Etat pour accueillir les enfants chez moi. J’ai commencé cette nouvelle vie, le 2 novembre 2015 avec l’arrivée d’une petite Jade. »
Tu rêves d’un jardin et bien on va le faire ce beau jardin !
C’est grâce à Halima que l’histoire du jardin pédagogique a démarré. Halima est la voisine de Myriam. Elles font le même métier et sont toutes les deux très sensibles à la nature. Elle rêvait, elle aussi, d’un jardin pour les enfants. « Au détour d’une promenade, je lui ai dis : « Tu rêves d’un jardin ? On va le faire ce beau jardin ! »
Un jardin est un formidable territoire de pédagogie
« Derrière chez nous, il y avait un lieu qui me semblait idéal. J’imaginais déjà un vaste potager dans lequel les assistantes maternelles pourraient venir avec leurs petits. A partir de 18 mois, ce sont des éponges, sensibles à tout ce qu’on leur montre. Un tel lieu est un formidable territoire de pédagogie et un véritable lieu d’exploration pour les enfants. Cela développe leur sensibilité à l’ environnement et au plaisir de vivre dans la nature même au coeur d’une ville ! C’est aussi un endroit où chacune d’entre nous peut s’exprimer, initier des activités avec les petits et retrouver le plaisir de jardiner comme nous le faisions nous même enfant.
Je voulais aussi mettre un coup de projecteur sur la profession d’assistante maternelle
Avec ce projet, je voulais aussi mettre un coup de projecteur sur cette profession. Les assistantes maternelles sont les invisibles de la petite enfance. Les parents mettent la plupart du temps leurs bébés chez elles en dernier recours parce qu’ils n’ont pas eu de place en crèche. Elles sont également très isolées car elles travaillent seules, chez elles. Je voulais un lieu qui leur donne de la visibilité, où elles puissent se retrouver et s’entraider. J’ai donc écris une lettre au maire dans lequel j’ai expliqué mon rêve de végétaliser un grand espace derrière mon immeuble. Cet endroit serait dédié aux enfants gardés par les Asmat de la ville. A Issy-les-Moulineaux, nous sommes 326 femmes à nous occuper de près de 2000 bébés. Ça n’est pas rien !
Les élus de la ville ont été sensibles à ce projet de jardin pédagogique
Les élus de la ville ont été sensibles à ce projet de jardin pédagogique. Le maire m’a renvoyé sur le conseil de quartier. J’ai eu énormément d’encouragement. Et finalement, le projet a été voté. Mais l’espace que j’envisageais n’a pas été retenu. Il y avait des problèmes techniques. C’est sur un terrain dans la Sente de Bretagne que la mairie m’a proposé d’installer un jardin partagé. Je rêvais de 300 m2 mais nous n’avons eu que deux parcelles de 16 m2. Je peux comprendre. Nous sommes nombreux à vouloir jardiner et les espaces libres en ville sont rares. Il faut de la place pour tout le monde ! Les autres parcelles ont donc été attribuées à des personnes du quartier.
Les connaissances de Maria, José et Olivier ont été d’une aide précieuse pour le jardin pédagogique
Le jardin a démarré avec l’aide d’un ami de Myriam, Olivier Ducorneau, ingénieur agronome et maraîcher qui les conseille sur les plantations. « Nous avons reçu beaucoup d ‘aide. Avant qu’on nous installe l’eau, nous allions la chercher à la Seine. Mais le supermarché d’à côté nous a permis d’en prendre chez lui. Le poney club nous a aussi donné du purin. J’ai acheté pleins de jolis outils avec des manches en bois colorés dans des brocantes « , se souvient Myriam. Maria qui est assistante maternelle depuis 20 ans et son mari José ont également été de vrais moteurs pour ce jardin. Ils ont une maison en Normandie où ils cultivent sur 2000 m. « Ils nous ont montré et expliqué beaucoup de choses. José a même fabriqué de ravissantes biches en bois pour les enfants. »
Un jardin pédagogique est un formidable espace de créativité pour les assistantes maternelles
« Les assistantes maternelles engagées dans le projet ont commencé à proposer aux enfants des ateliers d’éveil autour du jardinage. Les petits passent une heure à arroser, aller chercher de l’eau, planter leur semis… Quel bonheur d’observer avec eux le processus de vie autour de la graine que l’on a récupérée dans une tomate. Quand un enfant a vu cela dès son plus jeune âge, il grandit avec cette sensibilité. La nature est indispensable dans le développement d’un être humain. Et les enfants sont tellement heureux ! Au-delà même du jardinage, le jardin et la nature sont de formidables espaces de créativité pour nous toutes. Nous avons cherché à utiliser ce que la nature nous offrait pour imaginer des activités ludiques et créatives avec les enfants. Certaines femmes, comme Maria se sont découverts de vrais talents cachés d’artistes ! Nous avons créer des tableaux de feuilles, de belles décorations de Noël avec des pommes de pin, des feuilles tombées des arbres… Nous avons organisé des chasses aux oeufs. Et bien sur, les parents sont ravis ! »
Les jardins pédagogiques dédiés aux enfants touchent le cœur de tout le monde
Ce lieu a aussi permis de tisser des liens dans le quartier. La nature nous rassemble. Une vieille dame nous a proposé d’arroser nos plantes en août. Un architecte à la retraite est venu nous féliciter pour cette initiative. Un fleuriste nous a donné de jolis arrosoirs colorés. Beaucoup de gens nous ont fait des dons de plantes. Les jardins partagés dédiés aux enfants touchent le cœur de tout le monde. Le maire en personne est venu inauguré notre jardin ! » Aujourd’hui, l’association « Potagers d’avenir » compte une dizaine d’Assistantes maternelles actives dans le jardin et les parents viennent aussi jardiner avec elles. Elles partagent le jardin avec les gens du quartier et Myriam fourmille d’idées pour animer, décorer, rendre vivant et convivial ce lieu d’éveil pour les petits comme pour les grands.
Bravo à Myriam mais aussi à Maria et José, Carole et Christophe, Valérie et Didier, Marie, Rosa, Halima et Mohamed⚘, Constance, Fatima, Arlette d’émerveiller les yeux des petits et des grands !
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