Wesh Grow : le maraîchage urbain côté cave et côté toit
Côté toit, je vous présente Ilia, jeune ingénieur agronome en charge des merveilleux aromatiques qui poussent sur le toit du centre commercial Beaugrenelle. Côté cave, Simon me fait découvrir le monde des micro-pousses qui prennent vie dans les entrailles d’un parking sous-terrain près de la Porte de la Chapelle. Deux styles et deux techniques de maraîchage urbain très différents sous le chapeau d’une même start-up : Wesh Grow. Vous avez envie d’en savoir plus ? Suivez-moi !
Le maraîchage urbain côté cave : Plongeon dans le monde sous-terrain des micro-pousses
Connaissez-vous les micro-pousses ? En ce qui me concerne, j’en ignorais tout jusqu’à ma rencontre avec Simon, agronome chez Wesh Grow. Les micro-pousses sont des bébés plantes, des petites tiges bien vertes, pleines de nutriments et de goût. Bref, un régal pour nos papilles. En gastronomie, la micro-pousse est la touche finale, « le topping », comme disent les pros, qui vient orner l’assiette et la rendre élégante. Elle vient aussi lui donner ce petit goût délicat acide ou sucrée qui enchante le palais. Chez Wesh Grow, il faut descendre au 3ème sous-sol d’un parking pour les découvrir. Etrange sentiment que de se glisser dans le monde sous-terrain de l’agriculture urbaine.
J’ai trouvé cela magique de me retrouver dans ce lieu si spécial à faire pousser des micro-pousses dans des armoires
« Je suis arrivé il y a deux ans au tout début de l’aventure », m’explique Simon. J’avais 25 ans. Laurent et Glenn, les deux co-fondateurs de Wesh Grow m’ont fait confiance. J’ai trouvé cela magique de me retrouver dans ce lieu si spécial à faire pousser des micro-pousses dans des armoires à côté de gens qui faisaient pousser des champignons et des endives (La Caverne). J’ai découvert le petit monde de l’agriculture urbaine. Mes connaissances en agronomie apprises à l’école sont peu utiles ici. L’hydroponie, les solutions nutritives, les éclairages horticoles, tout cela était nouveau pour moi. J’ai appris sur le tas en regardant des tutos sur internet, en me renseignant sur ce qui se faisait en France et ailleurs. J’ai beaucoup tatonné au début.
Et comment ça pousse une micro-pousse ?
Les graines sont plantées dans de la cellulose, c’est-à-dire un papier compostable imbibé d’eau. Elles vont germer comme les graines de haricot que l’on fait pousser dans du coton à l’école. Pour cela, elles sont mises dans ce que l’on appelle une nurserie. Ce sont des armoires chauffées avec un taux d’humidité pouvant aller jusqu’à 90%. Les barquettes sont ensuite déposées sur des tables sous des lumières artificielles.
Un système de maraîchage urbain : l’hydroponie
Elles poussent alors en hydroponie. Les plantes sont nourries grâce à des nutriments dissouts dans l’eau. Afin de ne pas consommer trop, l’eau circule en circuit fermé. La plante absorbe ce dont elle a besoin et le résidu d’eau retourne dans un réservoir. L’hydroponie permettrait d’économiser 70% à 90% d’eau par rapport à la pleine terre. En revanche, les leds qui imitent le soleil sont très énergivores. Ce système permet cependant d’avoir des rendements intéressants, de produire toute l’année et il est reproductible n’importe où.
La micro-pousse demande beaucoup d’attention
Nous produisons 1800 barquettes par semaine. Elles sont semées à la main et mettent de 7 à 50 jours selon les espèces pour arriver à maturité. La micro-pousse demande beaucoup d’attention. Si l’on dépasse la date, le produit n’est plus bon. Les feuilles deviennent trop grandes et les chefs n’en veulent plus. Nous proposons entre 20 et 25 espèces qui varient selon les saisons et qui finiront dans les assiettes de grandes tables parisiennes !
Ces micro-pousses made in Paris sont vendues aux chefs dans leur barquette. Ultra fraîches, cueillies et livrées à vélo le jour même, elles se gardent ainsi environ une semaine. Wesh Grow fournit actuellement 150 restaurants parisiens.
Le maraîchage urbain côté toit : prêt pour un tour du monde des saveurs ?
Coté toit, on respire mieux. Cette fois-ci, c’est Ilia, jeune ingénieur agronome de 27 ans qui m’accueille au pied de la tour du centre Beaugrenelle. Une fois là-haut, dans ce champ perché, encerclé de tours, la vue sur Paris est impressionnante. L’air embaume des effluves de basilic. Autour de moi, 3000 m2 d’aromatiques cultivés en pleine terre et 50 variétés inconnues : verveine d’Argentine, Basilic Kenyan, cataire citronnée, menthe bergamotte, tagète citron, estragon du Mexique, fleurs de bourrache, romarin Sappho, fleurs de coriandre, shizo vert et rouge. Un véritable tour du monde de saveurs et d’odeurs pour le bonheur des chefs qui viennent ici trouver l’inspiration pour leur plat.
Un tour du monde des saveurs sans empreinte carbone !
Nous avons décidé de nous lancer dans les aromatiques rares, car nous ne voulions pas être en concurrence avec les herbes venues d’Israël et vendues à Rungis 0, 10 cts la botte. Nous ne voulions pas non plus nous mettre en concurrence avec les maraîchers d’Ile-de-France. On a préféré innover en proposant des produits rares. Ce sont des variétés souvent complexes avec plusieurs tonalités. La menthe russe et ses notes d’agrume, la menthe Suisse ultra fraîche, la menthe des cerfs qui n’a pas le parfum de menthe. Nous voulions surprendre les chefs. Nous leur proposons un vrai tour du monde des saveurs sans empreinte carbone !
Le maraîchage urbain et péri-urbain est un sujet passionnant qui permet de créer des filières courtes en ville.
De plus, les plantes aromatiques ont la particularité de ne pas se conserver très longtemps. Le délai doit être très court entre la récolte et l’assiette. Donc les cultiver à Paris a vraiment du sens. On les récolte le matin. Elles partent dans le 18ème et de là, elles vont directement en vélo chez les chefs. Le maraîchage urbain et péri-urbain est un sujet passionnant qui permet de créer des filières courtes en ville. Même si, bien sûr, on ne pourra pas tout cultiver à Paris. Il n’y a pas assez de surface ! Mais toutes les surfaces disponibles doivent être cultivées. Il faut rapprocher les producteurs des consommateurs.
Nous avons réalisé un grand tour des pépiniéristes spécialistes de certains aromates
Nous avons fait un gros travail de sélection. Pour cela, nous avons réalisé un grand tour de pépiniéristes spécialisés. Ces botanistes sont de vrais passionnés qui prospectent dans le monde entier pour trouver de nouvelles variétés. Nous sommes allés les voir. Nous avons dégusté et trouvé de véritables pépites. Nous les avons ramenées ici et plantées.
Fleur de coriandre Estragon du mexique Verveine d’argentine La bouillabaise revisitée avec l’estragon du Mexique du chef Ludo au Grand Beau. Les herbes sélectionnées par le chef (de gauche à droite): Menthe de Malaygues, Estragon du mexique, fleur de ciboule de chine, fleur de coriandre et menthe suisse.
Les chefs s’en inspirent pour renouveler leur carte
Le confinement a presqu’été une aubaine parce que les chefs avaient du temps. Ils ont pu venir sur le toit pour goûter nos herbes. Il y a une infinité de goûts possible dans chaque aromate. Les chefs s’en inspirent pour renouveler leur carte. Nous avons composé notre sélection avec nos clients. « Ce lieu nous apporte une ouverture d’esprit. Tout est surprenant. D’habitude j’imagine un plat et ensuite je pense aux herbes. Ici c’est le contraire, je pars des aromates pour imaginer une recette. Ces plantes nous obligent à nous renouveler », m’explique le chef Ludo du restaurant Le Grand Beau qui vient chaque jeudi faire son marché directement sur le toit.
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