Savez-vous que vous, simple citoyen, pouvez aider la science ? Pour cela nul besoin de faire 10 ans d’études ni de partir au bout du monde. Il suffit de descendre dans votre rue avec un papier, un crayon et un appareil photo ! Cela s’appelle « les sciences participatives« . Grâce aux données que vous allez collecter près de chez vous, vous aiderez les scientifiques à mieux comprendre la biodiversité en ville. De 7 à 77 ans tout le monde peut participer et apprendre en s’amusant. Elodie Masseguin, coordinatrice des programmes participatifs chez Tela Botanica nous explique le principe des sciences participatives et nous fait découvrir le programme « Sauvages de ma rue ».

Qu’est-ce que les sciences participatives ?
Les sciences participatives donnent aux citoyens la possibilité de collaborer à la recherche. En collectant des données près de chez eux, ils aident les chercheurs à répondre à des questions et faire avancer la science sur des sujets précis. Elles sont portées en France par Vigie-Nature (créé il y a plus de 20 ans par le Muséum national d’Histoire naturelle) et Tela Botanica (pour les programmes concernant la flore). Ces deux réseaux publient ensuite les résultats des études scientifiques menées à partir de ces observations.
Pouvez-vous nous expliquer le projet « Sauvages de ma rue ?«
L’idée vient au tout départ d’une chercheuse, Nathalie Machon, qui travaille sur la biodiversité urbaine. Son objectif était de savoir comment la flore sauvage en ville utilise les interstices tels que les fissures dans les murs ou dans les trottoirs pour se disperser d’un endroit à l’autre et avancer dans la ville. Ces données permettent de comprendre où sont les espèces, comment ces « brèches urbaines » : pieds d’arbres, espaces engazonnés… influent sur la qualité de la biodiversité. Pour valider ces hypothèses, elle a besoin d’obtenir de nombreuses données. Elle ne peut pas le faire toute seule. Elle a donc décidé de faire appel à Tela Botanica qui a développé les outils de participation citoyenne.
Comment faire pour mobiliser ainsi les citoyens ?
Nous développons des outils libres et accessibles à tous. Avec ces outils, nous aidons les apprentis chercheurs à reconnaître les plantes. Nous leur fournissons une fiche terrain à renseigner et nous avons créé une plate-forme en ligne pour envoyer les données. Ils ont également accès à une cartographie des observations. Ensuite nous extrayons ces données pour que les chercheurs puissent les analyser. Les programmes de sciences participatives sont relayés au niveau du terrain par des associations locales ou des acteurs territoriaux.
Comment intégrer un programme de sciences participatives ?
C’est très simple. Il suffit de descendre en bas de chez soi, choisir un trottoir et identifier l’ensemble des plantes sauvages qui y poussent. Ce sont des plantes que nous croisons chaque jour autour des pieds d’arbre, plates-bandes, jardinières, murs. Il n’y a pas besoin d’être un botaniste éclairé pour participer à ce programme. Nous fournissons des outils très simples qui vont permettre à chacun de lister les espèces végétales qui poussent dans leur rue.

Qui peut participer ?
Tout le monde ! « Sauvages de ma rue » est accessible à tous : de 7 à 77 ans. Je le redis, il n’y a pas besoin d’avoir de grandes compétences en botanique. Il est à la portée des débutants. Il peut se faire toute l’année. Le printemps est cependant la meilleure période car les plantes sont en fleur. Attention cependant, nous sommes sur des recherches portant uniquement sur les brèches urbaines. Il ne faut pas recenser les plantes des jardins ou des friches. Ces recherches peuvent se faire seul ou en groupe. Nous organisons également des formations de sciences participatives notamment auprès des associations d’éducation à l’environnement, des collectivités territoriales, des habitants, des professeurs qui animent ensuite localement les recherches. De nombreuses écoles ont participé au programme ! Une plate-forme Vigie nature Ecole est d’ailleurs dédiée aux enseignants.
Quels sont les outils à la disposition de nos chercheurs en herbe ?
Tout d’abord, vous pourrez télécharger sur le site « Sauvages de ma rue » une fiche de terrain sur lequel vous allez pouvoir indiquer vos observations.

Pour reconnaître les plantes, nous avons publié un guide « Sauvages de ma rue » qui coûte 12 euros et recense les 240 espèces les plus communément trouvés en ville.
Vous pouvez aussi télécharger gratuitement l’application « Sauvages de ma rue » sur votre smartphone. En cas de doute, il est possible d’envoyer une photo des plantes sur notre plate-forme identiplante. D’autres amateurs éclairés vous aideront à les identifier.

Faut-il s’engager à le faire tous les ans ?
Non, il n’y a aucun engagement. Vous pouvez le faire quand vous voulez. L’important est surtout de respecter le protocole imposé par les chercheurs.
Combien de plantes sont aujourd’hui répertoriées ?
On compte environ 1000 espèces végétales spontanées dans Paris intra muras. 1500 espèces ont été détectées en Ile-de-France et autour de 7000 dans toute la France.

L’abandon des produits phytosanitaires a-t-il favorisé le développement de la biodiversité dans les villes ?
Oui, l’abandon des produits phytosanitaires a été très bénéfique à la biodiversité. Certaines espèces disparues sont revenues et les plantes sauvages ne sont plus éradiquées comme avant. La végétation en ville est donc beaucoup plus luxuriante maintenant qu’il y a 10 ans.
Combien de données avez-vous recueilli ?
Ce programme de sciences participatives rencontre un énorme succès. La première année, nous n’avions que quelque retours par ci par là mais peu à peu des groupes de passionnés, des mairies, des associations, des écoles se sont mobilisés et ont organisé des sorties. Depuis le début du programme en 2012, nous avons recueillie 100 000 données. Des quantités aussi importantes aident vraiment les chercheurs dans leur travail.

A quoi servent ces données ?
Ces données permettent de voir l’état de la biodiversité, de décrire les changements qu’elle subit et d’essayer d’en comprendre les mécanismes. Le programme « Sauvages de ma rue » a ainsi permis de voir le lien entre la biodiversité en ville et la désertion des insectes des centres villes. Depuis quelques années, les chercheurs utilisent aussi les données pour voir s’il y a un lien entre la ville et les espaces agricoles installés à proximité. Ils observent les échangent de végétation entre ville et agriculture. Nous verrons aussi au fil du temps comment évolue la flore.
Finalement en aidant la science vous aidez les citoyens à se reconnecter avec la nature en ville ?
Oui, ces recherches ont permis de sensibiliser les citadins à la biodiversité qui les entourent. Il y a beaucoup d’espèces qui font parti du patrimoine naturel des Français. Pourtant on ne sait plus reconnaître les fleurs ou on ne connaît plus leur nom. Ces connaissances qu’avaient nos grands-parents se sont perdues au fil du temps. La verveine par exemple, tout le monde connaît le nom mais peu savent qu’elle pousse dans nos villes. Beaucoup ont été très étonnés de découvrir la diversité des plantes qui poussaient sous leur fenêtre. C’est une grande satisfaction pour les participants de pouvoir reconnaître et mettre un nom sur ces plantes sauvages urbaines.
Vous aussi vous voulez participer à un programme de sciences participatives ?
Il existe de nombreux programmes de sciences participatives ! Chacun peut choisir en fonction de ses affinités.
Vous trouverez sur le site Vigie-nature pas moins de 8 programmes accessibles à tous !
L’association Tela Botanica invite également toutes les structures et collectivités souhaitant s’investir dans ce programme de la contacter à sauvages@tela-botanica.org
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